Colombie : au-delà de la propagande ... la réalité (suite)
Colombie : au-delà de la propagande ... la réalité
Trois articles concernant la Colombie, pour sortir des images faussées du monde assénées par les médias, nos politiciens, les pseudo-intellectuels ... tellement peu conforme à la réalité.
Complément de l'article précédent concernant la désinformation US Désinformation : Colombie-Vénézuela, Uribe-Chavez et les FARC , pour lequel je n'avais pas eu le temps de chercher des articles sur le net pour pour étayer mes dires, faits à l'appui.
LE COURRIER 25 mai 2008
Colombie : le président Uribe extrade ses témoins gênants...
PEREZ Benito
Alvaro Uribe est un politicien diablement habile. En extradant mardi vers les Etats-Unis les principaux chefs paramilitaires « démobilisés », le président colombien a réalisé un coup de maître.D’un unique geste, il a mis le masque de l’intransigeance et ravi son allié du Nord... tout en éloignant plusieurs témoins gênants. Ceux-là mêmes qui distillent depuis des mois les révélations sur les liens entre pouvoir, narcotrafic et assassinats politiques, au point de faire vaciller le chef de l’Etat. Chapeau l’artiste !
Aux Etats-Unis, Salvatore Mancuso et consorts – accusés de centaines de massacres, de plus de 15000 assassinats et de davantage encore de disparitions forcées – ne pourront être inquiétés que pour des délits liés à la drogue. Et quoi qu’en dise M. Uribe, les extradés ne risquent pas de recevoir beaucoup de visites de juges colombiens enquêtant sur les massacres (et encore moins des parties civiles).
Le coût des déplacements, la dispersion des extradés sur quatre Etats et les freins procéduraux devraient refroidir les ardeurs. Qu’on en juge : la justice colombienne n’a toujours pas obtenu les pièces de la condamnation aux Etats-Unis de Chiquita pour financement des « paras ». Dans l’autre sens, le procès l’an dernier de la société Drummond, devant une cour US, avait été torpillé par le refus de Bogota d’expédier certains documents...
Le message de M. Uribe aux « paras » demeurés au pays est clair : ceux qui ne sont pas satisfaits de leur sort et qui bavardent encourent l’extradition. Quant à ceux qui ont été expédiés, ils n’ont plus intérêt à poursuivre leurs révélations : ils ne feraient que susciter la curiosité des juges colombiens, sans attendrir leurs collègues étasuniens...
Bien sûr, rien ne dit que cette barrière juridico-géographique préservera indéfiniment le régime d’Alvaro Uribe. On ne peut exclure que le sentiment de trahison délie les langues. Mais la maison était en feu, et le président se devait de reprendre la main.
Depuis que la Cour constitutionnelle a modifié la loi de démobilisation des paramilitaires, les obligeant à parler s’ils veulent obtenir les réductions de peines initialement garanties par M. Uribe, le « processus de paix » s’est progressivement retourné contre son instigateur.
En près de deux ans d’enquêtes, la justice, la presse et les partis d’opposition ont commencé à mettre en évidence le réseau mafieux – dit « parapolitique » – qui dirige le troisième pays d’Amérique du Sud. Des dizaines d’« uribistes » – ministres, gouverneurs, députés, présidents de Chambre, fonctionnaires, etc. – sont tombés, et le chef de l’Etat a senti le souffle de la justice se rapprocher, lors de l’arrestation de son cousin Mario Uribe en avril dernier. Pis, son projet de seconde réélection, en 2010, commence à prendre l’eau, après l’éclatement fin avril de l’affaire Yidis Medina, du nom d’une ex-congressiste affirmant avoir vendu sa voix pour faire adopter la réforme constitutionnelle qui a permis la première réélection du président en 2006...
Politiquement, ces scandales à répétitions ont déjà coûté cher à M. Uribe, qui a vu son projet phare d’accord de libre commerce rejeté par le Congrès étasunien. Nul doute que l’extradition des « paras » pourrait adoucir la majorité démocrate comme elle ravit l’administration Bush, peu désireuse de voir éclaboussé son principal allié politique et militaire dans la région. Quant aux entreprises bananières nord-américaines, elles ne doivent pas être mécontentes de savoir Mancuso aux mains des juges US anti-drogue : l’ex-porte-parole paramilitaire n’avait-il pas déclaré que Dole, Chiquita et compagnie avaient volontairement financé le travail antisyndical de ses troupes ?
Mieux vaut effectivement ne parler que trafic de coke !
21 mai 2008
"un officier militaire a pris la petite fille par les cheveux et lui a tranché la gorge avec une machette"...
La propagande et les droits humains en Colombie
LEECH Garry
Cela se répète immanquablement. Lorsque des paysans colombiens sont assassinés le gouvernement accuse immédiatement les Forces Armées Révolutionnaires de Colombie (FARC) et les médias dominants, aussi bien en Colombie qu’aux États-Unis, font fidèlement écho à ces accusations. Le plus souvent des preuves apparaissent postérieurement qui montrent que les responsables du crime sont l’armée colombienne ou ses alliés paramilitaires. Cependant, les médias dominants ne rendent généralement pas compte des nouveaux éléments avec la même vigueur qu’ils avaient montrée pour rapporter la responsabilité des FARC dans l’information de départ – dans le meilleur des cas, c’est-à-dire s’ils rendent compte des nouveaux développements. En conséquence, la campagne de propagande du gouvernement colombien a réussi à créer l’impression dans bien des esprits que les FARC sont les responsables de la majorité des violations des droits humains alors que les chiffres publiés par les organisations de défense des droits humains sont en contradiction avec ce sentiment général.
L’abîme entre ce que les gens croient et la réalité de la situation des droits humains en Colombie est apparue avec évidence avec le récent mandat d’arrêt lancé contre les soldats colombiens responsables de l’assassinat de 8 paysans en février 2005 dans la communauté de paix de San José de Apartadó. Immédiatement après le massacre, des membres de la communauté avaient affirmé que l’armée colombienne opérait dans la zone au moment des faits. Le ministre colombien de la défense avait immédiatement démenti ces affirmations, assurant que l’armée n’était pas impliquée dans les crimes et qu’il n’y avait pas de militaires à moins de deux jours de marche du lieu du massacre.
Le vice-président Santos avait alors rapidement cherché à faire porter la responsabilité du massacre à la guérilla, déclarant : « Le gouvernement a des preuves qui établissent que les FARC sont coupables de cet horrible crime ». Selon ces dernières preuves, les victimes étaient des collaborateurs des FARC assassinés pour avoir tenté de quitter l’organisation insurgée. Puis, quelques semaines après le massacre, le président Álvaro Uribe Vélez a accusé les dirigeants de la communauté de paix de San José de Apartadó d’« aider les FARC » et de « vouloir utiliser la communauté de paix pour protéger cette organisation terroriste ». En assimilant les victimes aux guérilleros – stratégie habituelle du gouvernement colombien – le président tentait de détourner notre regard des probables coupables et de rendre les victimes responsables de leur propre mort.
Les médias dominants ont fidèlement rapporté toutes les accusations émises par le gouvernement, mais le fait que le massacre se fût produit dans la communauté de paix de San José de Apartadó allait se transformer en problème pour Uribe Vélez. Depuis une dizaine d’années la communauté de paix a suscité un mouvement de solidarité internationale et elle est accompagnée par des organisations de défense des droits humains. Du coup les médias dominants ont dû rapporter, dans ce cas précis, la version des membres de la communauté selon laquelle l’armée colombienne était impliquée dans le massacre.
Finalement la semaine dernière – plus de trois ans après le massacre – la Fiscalía general a émis un mandat d’arrêt contre 15 personnes accusées d’avoir commis ces assassinats. Le mandat a été émis à la suite du témoignage d’un paramilitaire démobilisé nommé Jorge Luis Salgado. Selon Salgado, lui et d’autres paramilitaires étaient les guides de la patrouille militaire qui a commis le massacre dans le hameau de Mulatos à San José de Apartadó.
Salgado a donné sa version du massacre : « Les enfants se cachaient sous les lits. La fille, cinq ou six ans, était très jolie et le garçon était mignon aussi. Nous avons suggéré aux officiers de les laisser dans une maison voisine, mais ils ont répondu que ces enfants représentaient une menace, qu’ils allaient devenir des guérilleros dans le futur ». Salgado a alors affirmé qu’un officier militaire, qui utilisait le nom de Cobra, « a pris la petite fille [de cinq ou six ans] par les cheveux et lui a tranché la gorge avec une machette ».
Le récit de Salgado non seulement confirme ce que disent les membres de la communauté depuis le début, mais de plus il signale la réalité de la collusion entre l’armée colombienne et les paramilitaires d’extrême droite près de trois ans après l’entrée en fonction du président Uribe Vélez. Malheureusement, la majorité des Colombiens tués par les militaires et les paramilitaires résidaient dans des communautés qui n’avaient pas le niveau d’exposition médiatique de San José de Apartadó. En conséquence, la stratégique propagandistique du gouvernement, qui consiste à accuser systématiquement les FARC, a souvent beaucoup plus de succès.
Autre exemple, cinq Indiens awa ont été massacrés tôt dans la matinée du 9 août 2006 dans le village d’Ataquer, dans le département de Nariño. Les tueurs, à moitié en tenue militaire, sont arrivés à 4 heures du matin le Jour international de l’Indigène ; ils ont tiré les dirigeants indigènes de leur lit et les ont tués.
Je suis allé jusqu’à la ville de Pasto le lendemain de ces assassinats. Dans ma chambre d’hôtel j’ai vu un général déclarer au téléjournal du soir que les FARC avaient commis le massacre. Tous les grands médias colombiens ont avec discipline répercuté ces accusations de l’armée colombienne. Quelques jours plus tard, le colonel Juan Pablo Amaya Kerguelen a déclaré : « Nous sommes ouverts à toutes les investigations, mais nous savons qu’il s’agissait d’une vengeance de la guérilla à l’encontre des Indigènes qui refusaient d’être des informateurs ».
Lorsque j’ai interrogé un porte-parole du bataillon Grupo Cabal – l’unité de l’armée dans la zone où s’est produit le massacre –, il m’a réitéré que la guérilla était responsable des assassinats. Et, comme c’est arrivé à la suite du massacre de San José de Apartadó, le gouvernement a émis une déclaration selon laquelle certaines des victimes pourraient avoir été des guérilleros, insinuant donc que c’était des terroristes qui avaient été tués.
Deux jours après le massacre, je suis allé de Pasto à Ataquer et je me suis alors rendu compte qu’aucun correspondant étranger n’avait fait le déplacement pour suivre l’affaire. Comme toujours, les journalistes étrangers rendaient compte du massacre à partir de la capitale du pays, Bogotá, et une fois de plus ils ne rendaient compte de la nouvelle que sur la base des sources officielles, lesquelles affirmaient que les FARC étaient responsables.
Vues les conditions – selon les gens du lieu, la forte présence militaire que j’ai constatée dans le village était identique au moment des assassinats –, il était clair pour moi que les guérilleros n’avaient pas pu commettre le massacre. J’ai su aussi que les Indiens awa et beaucoup d’habitants de la zone en étaient arrivés à la même conclusion que moi : l’armée était responsable du massacre. C’était également l’armée qui avait provoqué le Déplacement forcé de 1 700 Awa à peine un mois avant. J’avais fait connaître mes conclusions dans un article publié dans World Indigenous News. Les organisations indigènes nationales et internationales ont alors demandé à la Fiscalía general de réaliser une enquête pour établir les responsabilités de l’armée.
L’année suivante l’enquête de la Fiscalía general permettait d’identifier onze suspects du meurtre des cinq dirigeants awa. Six suspects étaient des officiers de l’armée, cinq étaient des civils. Étant donné que les Awas n’ont pas la projection internationale de San José de Apartadó les médias n’ont bien entendu pas rendu compte des nouvelles conclusions et ont continué de laisser penser que les guérilleros des FARC avaient commis le massacre.
Ces deux massacres illustrent la stratégie propagandistique quotidiennement utilisée par le gouvernement colombien. À chaque fois que se produit un massacre, les FARC sont immédiatement accusées de façon officielle et les médias dominants répercutent servilement ces accusations sans enquêter eux-mêmes sur les crimes. Et lorsque les preuves finissent par établir que c’était en fait l’armée colombienne et les paramilitaires qui avaient commis les assassinats, les médias dominants ne rendent généralement pas compte des nouvelles révélations, laissant donc l’impression que les FARC étaient les coupables.
Cette stratégie propagandistique utilisée par le gouvernement colombien –avec la bienveillance des médias dominants– fait que la perception générale du conflit est déconnectée de la réalité quant à la situation des droits humains sur le terrain. Les gens sont saturés d’articles racontant des assassinats soi-disant perpétrés par les guérilleros alors qu’il y beaucoup moins d’articles rapportant les crimes commis par les militaires colombiens et leurs alliés paramilitaires – quelques détails de crimes anciens révélés dans des témoignages de paramilitaires démobilisés sont certes parfois publiés.
Les organisations de défense des droits humains, colombiennes et internationales, qui enregistrent de façon routinière les violations des droits humains, ont montré à de nombreuses reprises et pendant des années que les guérilleros ne sont responsables que d’une partie mineure des assassinats de civils. Par exemple, la Commission Colombienne des Juristes (CCJ) a rapporté l’an passé que durant le premier mandat du président Uribe Vélez (2002-2006) les guérilleros étaient responsables de 25% des assassinats de civils ; cependant que les paramilitaires étaient responsables de 61% des morts et les militaires de 14%.
Comme la majorité des gens ne lisent pas les rapports annuels des organisations de défense des droits humains, ce sont les articles de presse qui modèlent l’opinion générale. En conséquence, les accusations du président Uribe Vélez selon lesquelles les organisations de défense des droits humains sont des porte-parole des guérilleros apparaissent aux yeux de beaucoup comme vraisemblables parce que les chiffres qu’elles présentent sur la question des droits humains sont en contradiction avec la perception de la plupart des gens, perception selon laquelle les FARC sont les principales responsables des violations des droits humains.
La même stratégie propagandistique est à l’œuvre pour d’autres questions, toujours en relation avec les droits humains en Colombie. Selon le Conseil pour les droits humains et le Déplacement (CODHES), par exemple, 305 966 personnes ont été victimes de Déplacement forcé en 2007 – une brutale augmentation de 38% par rapport à 2006. Cependant, comme les militaires colombiens et les paramilitaires sont responsables de la majorité des Déplacements forcés, et parce que les victimes sont des paysans pauvres de Colombie, il n’y a guère d’attention gouvernementale sur ces violations des droits humains – et par extension guère de suivi médiatique de cette crise humanitaire.
En contrepartie, on porte toute l’attention, aussi bien en Colombie qu’à l’échelle internationale, sur la question des enlèvements. Contrairement aux Déplacements de personnes, la plupart des victimes des enlèvements sont des membres des classes moyennes ou des classes supérieures ; et ce sont les guérilleros qui sont responsables. La couverture médiatique disproportionnée du calvaire subi par quelques centaines de victimes d’enlèvements permet au gouvernement de maintenir l’attention sur les violations des droits humains commises par les FARC. Cependant, plus d’un quart de millions de Colombiens sont déplacés tous les ans – la plupart par les forces de sécurité – et leur calvaire est quasiment ignoré.
La stratégie propagandistique du gouvernement colombien s’est révélée fort efficace pour cacher la véritable situation des droits humains dans le pays. Le personnel gouvernemental accusant les FARC quasi-quotidiennement pour les assassinats commis partout dans le pays et la forte attention portée sur la question des enlèvements ont convaincu la plupart des gens que les guérilleros sont les principaux responsables de la violence et des violations des droits humains. Le fait que la perception générale ne corresponde pas du tout à la réalité du terrain montre que la transformation de la question des droits humains en thème de propagande a parfaitement réussi au gouvernement colombien.
Finalement les médias dominants, aussi bien en Colombie qu’aux États-Unis, se font complices de cette guerre psychologique quand ils continuent de diffuser les accusations du gouvernement alors que les journalistes savent parfaitement que ces accusations sont souvent fausses. Ce gouvernement a déjà souventefois manipulé la presse ; ni les rédactions ni les reporters ne semblent être dérangés à l’idée de continuer d’être manipulés. Les représentants des médias dominants soutiennent que dans ces cas ils ne font que rendre compte de ce qu’a dit tel ou tel membre du gouvernement, et que les accusations de cet officiel sont en elles-mêmes des nouvelles. Or, quand ils rapportent loyalement et sans questionnement toute déclaration émise par des officiels gouvernementaux les médias dominants se muent en appareils de propagandes de l’État.
Par Garry Leech Le 31 mars 2008
Source : ColombiaJournal http://www.colombiajournal.org/colo...
Traduction : Numancia Martínez Poggi
Le 20 mars 2007
Des bananes qui ruissellent de sang
par Guido Piccoli
Si José Arcadio Secondo avait été syndicaliste cueilleur de bananes ces années-ci et non pas à Macondo il y a trois-quarts de siècle, il aurait eu encore mois de probabilité de mourir de vieillesse. Les bananes, à l'époque comme aujourd'hui, continuent à ruisseler de sang. C'est ce que confirme la sentence du tribunal de Washington, qui a condamné Chiquita Brands (des fameuses " Chiquita 10 e lode ! " ? NDT), à payer une amende de 25 millions de dollars pour avoir financé, de 1997 à 2004, à travers sa filiale Banadex, les Autodefensas Unidas de Colombia (Auc). L'histoire, ainsi, se répète, bien qu'on ait changé le nom de la multinationale (qui autrefois s'appelait United Fruit) et ses méthodes de répression, réalisée dans les années 20 par les massacres de l'armée (comme le raconte Gabriel Garcia Marquez dans Cent ans de solitude), et maintenant avec les mini-Uzi (des armes dont vous verrez la photo en allant sur un site très instructif à ce sujet) des sicaires paramilitaires. Les paiements des Auc furent approuvés " pour garantir en bonne foi la sécurité de nos employés ", a répondu pour sa défense le président de Chiquita Brands, depuis son siège de Cincinnati, dans l'Ohio. " L'amende à une entreprise, coupable d'avoir payé un groupe illégal ; est un signal magnifique, commente le ministre de la défense colombien, Juan Manuel Santos. Mais bien qu'elle ait fait grand bruit, la sentence du tribunal est presque une farce, pour ce qu'elle décrète et ce qu'elle omet.
Confirmant l'amer refrain colombien (" aux Usa les sous, à nous les morts "), les 25 millions de dollars entreront dans les caisses de l'état étasunien, au lieu de dédommager les victimes des paramilitaires qui, contrairement à ce que raconte le président de Chiquita, ne protégeaient pas les travailleurs mais se consacraient, avec la collaboration des militaires, à tuer et faire disparaître des syndicalistes et des représentants de la gauche légale, surtout forts dans la zone " bananera ". En outre, les juges de Washington se sont bien gardés d'approfondir certains épisodes bien plus graves qui prouvent une unité d'intentions entre Chiquita Brands et les Auc du (peut-être) défunt Carlos Castaño et de l'italo-colombien Salvatore Mancuso. Le plus bruyant arriva le 21 novembre 2001 (deux mois après l'inscription des Auc dans la liste des groupes terroristes internationaux, décidée par Bush après l'attentat des Tours Jumelles), quand, dans le port privé de Chiquita Brands de la petite ville atlantique de Turbo, on débarqua du navire Otterloo, 14 containers avec 3400 mitraillettes Ak-47 (les Kalachnikov, pas de lien pour la photo, on sait à peu près ce que c'est, NDT) et 4 millions de cartouches, destinés justement au " Banana Bloque " des paramilitaires. Evidemment avec la complicité des militaires, policiers et douaniers colombiens (en plus de leurs collègues nicaraguayens et panaméens). Alors qu'un an plus tard, Castaño lui-même, dans une interview donnée au quotidien El Tiempo, exaltait cette opération de réapprovisionnement belliqueux comme " le meilleur goal " réalisé par son organisation, l'enquête judiciaire colombienne fut ponctuellement enterrée, grâce à l'intervention de l'avocat général Luis Camilo Osorio (ex-ambassadeur colombien en Italie). Chiquita Brands en sortit tellement " propre " qu'elle remporta en avril 2004 le prix de la fondation Trust for Americas, pour son " engagement social contre la pauvreté et la corruption ". Ce fut même le président de l'Organisation des états américains, l'ex-président Cesar Gaviria, qui le remit, et eut ensuite l'impudence de nier qu'il savait que Chiquita Brands était impliquée dans le scandale de l'importation d'armes pour les paramilitaires.
Les syndicats colombiens ont déclaré qu'ils ne se contentaient pas de la sentence de Washington, en annonçant qu'ils continueraient la bataille non seulement contre Chiquita Brands, mais aussi contre Coca Cola, Oxy et les mines Drummonds, mandataires notoires des homicides de militants syndicaux. En demandant la solidarité internationale et en utilisant, en plus des contemporaines, une loi de 1789 qui prévoit qu'un étranger puisse dénoncer à la justice étasunienne les citoyens des Usa responsables de délits contre l'humanité. Loi qui, il y a plus de deux siècles, était faite pour combattre les pirates de sir Francis Drake, et qui pourrait aujourd'hui servir à freiner les guerriers bien plus cruels du " libre marché ".
Edition de vendredi 16 mars 2007 de Il manifesto
Traduit de l'italien par Marie-Ange Patrizio
Article très complet sur le même sujet :
Paru le Samedi 28 Juillet 2007
Benito PÉREZ Colombie : ces syndicalistes assassinés qui hantent les transnationale