Montpellier : exposition Gustave Courbet jusqu'au 28 septembre
Exposition Gustave Courbet
jusqu'au 28 septembre 2008
au Musée Fabre de Montpellier
Et un diaporama sur Midi-Libre, en 20 diapos avec texte et commentaires sonores à visiter : L'exposition Courbet au Musée Fabre commentée par le conservateur Sylvain Amic
Sylvain Amic présente l'exposition Courbet
Conservateur au Musée Fabre, Sylvain Amic nous a fait visiter la très attendue exposition Courbet, qui investit le lieu jusqu’au 28 septembre prochain. « Il n’y a avait pas eu de grande exposition sur Courbet depuis 1977 » explique Sylvain Amic. « Or, il est important, de temps en temps, de faire le point sur un artiste, et de convoquer les meilleurs oeuvres de sa carrière. »
116 tableaux, dessins et photographies, accompagnés de bornes multimédias, sont réunis ici. Un tour de force, rendu possible par la volonté de la réunion des Musées nationaux et du Musée d’Orsay, qui se sont associés au Metropolitan Museum of Arts de New-York et, bien entendu, au Musée Fabre de Montpellier. Découvrez dans ce diaporama une vingtaine d’œuvres commentées, via des podcasts, par Sylvain Amic. Une occasion rêvée de se familiariser avec le peintre, avant d’aller voir ou revoir son œuvre au Musée Fabre…
Propos recueillis par Christophe GREUET - Photo © Franck Valentin
Gustave Courbet ( extraits de Wikipédia)
(10 juin 1819 à Ornans, Doubs - 31 décembre 1877 à La Tour-de-Peilz en Suisse)
Il est un peintre français chef de file du courant réaliste. Engagé dans les mouvements politiques de son temps, il a été l'un des élus de la Commune de 1871.
Ses idées républicaines et socialistes lui font refuser la Légion d'honneur proposée par Napoléon III. Après la proclamation de la République le 4 septembre 1870, il est nommé président de la commission des musées et délégué aux Beaux-Arts ainsi que président de l'éphémère Fédération des Artistes.
Il propose au Gouvernement de la Défense nationale le déplacement de la Colonne Vendôme, qui évoque les guerres napoléoniennes, aux Invalides. Soutenant l'action de la Commune de Paris, il est élu au Conseil de la Commune par le VIe arrondissement aux élections complémentaires du 16 avril 1871; il siège à la commission de l'Enseignement et vote contre la création du Comité de Salut public, il signe le manifeste de la minorité.
Après la Semaine sanglante il est arrêté le 7 juin 1871, et le 3e conseil de guerre le condamne à six mois de prison — qu'il purgera à Paris, à Versailles et à Neuilly — et à 500 francs d'amende.
Il est acculé à la ruine après la chute de la Commune, ses biens mis sous séquestre, ses toiles confisquées. Il s'exile en Suisse, à La Tour-de-Peilz, près de Vevey.
Par solidarité avec ses compatriotes exilés de la Commune de Paris, Courbet refusa toujours de retourner en France avant une amnistie générale. Sa volonté fut respectée et son corps fut inhumé à La Tour-de-Peilz dans les premiers jours de 1878. Dans Le Réveil du 6 janvier, Jules Vallès rend hommage au peintre et à «l'homme de paix» :
« [...] Il a eu la vie plus belle que ceux qui sentent, dès la jeunesse et jusqu'à la mort, l'odeur des ministères, le moisi des commandes. Il a traversé les grands courants, il a plongé dans l'océan des foules, il a entendu battre comme des coups de canon le cœur d'un peuple, et il a fini en pleine nature, au milieu des arbres, en respirant les parfums qui avaient enivré sa jeunesse, sous un ciel que n'a pas terni la vapeur des grands massacres, mais, qui, ce soir peut-être, embrasé par le soleil couchant, s'étendra sur la maison du mort, comme un grand drapeau rouge. »
Gustave Courbet ( extrait du dossier sur L’Encyclopédie de l’Agora )
Vie et œuvre par Emile Zola, Lettres de Paris : "L'Ecole française de peinture à l'Exposition de 1878".
"J'ai dit que jusqu'ici il y a eu trois grands talents dans l'école française du XIXème siècle : Eugène Delacroix, Ingres et Courbet, et que ce dernier était aussi grand que les deux premiers. Les trois ensemble ont révolutionné notre art : Ingres accoupla la formule moderne à l'ancienne tradition ; Delacroix symbolisa la débauche des passions, la névrose romantique de 1830 ; Courbet exprima l'aspiration au vrai - c'est l'artiste acharné au travail, asseyant sur une base solide la nouvelle formule de l'école naturaliste. Nous n'avons pas de peintre plus honnête, plus sain, plus français. Il a fait sienne la large brosse des artistes de la Renaissance, et s'en est servi uniquement pour dépeindre notre société contemporaine.
Remarquez qu'il est dans la ligne de la tradition authentique. Tout comme le travailleur de talent qu'était Véronèse ne peignait que les grands de son époque - même quand il lui fallait représenter des sujets religieux -, de même le travailleur de talent qu'était Courbet prenait ses modèles dans la vie quotidienne qui l'entourait. C'est autre chose que ces artistes qui, voulant être fidèles aux traditions, copient l'architecture et les costumes des artistes italiens du XVIème siècle.
Au Champ-de-Mars il n'y a qu'une toile de Courbet : La Vague, et même ce tableau n'y figure que parce qu'il appartient au musée du Luxembourg, et dès lors l'Administration des beaux-arts a bien été obligée de l'accepter. Et c'est cette toile unique que nous montrons à l'Europe, alors que Gérôme dans la salle voisine ne compte pas moins de dix tableaux et que Bouguereau va même jusqu'à douze. Voilà qui est honteux. Il aurait fallu assigner à Courbet à l'Exposition universelle de 1878 toute une salle, comme on l'a fait pour Delacroix et Ingres à l'Exposition de 1855.
Mais on sait bien de quoi il retourne, Courbet avait participé à la Commune de 1871. Les sept dernières années de sa vie ont été de ce fait un long martyre. On commença par le jeter en prison. Ensuite, à sa sortie de prison, il faillit mourir d'une maladie qu'avait aggravée le manque d'exercice. Après, accusé d'avoir été complice du renversement de la colonne Vendôme, il fut condamné à payer les frais de la reconstruction de ce monument. On lui réclamait quelque chose dans la région de trois cents et quelques mille francs.
Les huissiers furent lancés à ses trousses et on opéra la saisie de ses tableaux. il fut obligé de vivre en proscrit et mourut à l'étranger l'an dernier, exilé de la France dont il aura été l'une des gloires. Imaginez un gouvernement qui fasse saisir les toiles de cet artiste pour solder les comptes de la restauration de la colonne Vendôme ! Je comprendrais mieux s'il les avait fait saisir pour les exposer au Champ-de-Mars. Cela aurait été plus à l'honneur de la France.
Du reste, on a toujours traité Courbet en paria. En 1867, quand la médiocrité académique de Cabanel s'étalait déjà devant les étrangers accourus de toutes parts, Courbet a dû organiser une exposition particulière pour montrer ses oeuvres au public. Il n'est plus parmi les vivants. On se doute pourquoi cette suprême humiliation, la plus grave de toutes, lui a été infligée, d'exposer au Champ-de-Mars son tableau La Vague. La place étroite qu'on a cédée à l'artiste est ironique au plus haut point et inconvenante. Qu'on enlève La Vague, car elle donne à réfléchir à tous les artistes magnanimes et indépendants qui s'arrêtent devant elle. Ils douteront du grand disparu, qu'on essaie d'enterrer sous une poignée de terre.
La Vague fut exposée au Salon de 1870. Ne vous attendez pas a quelque oeuvre symbolique, dans le goût de Cabanel ou de Baudry : quelque femme nue, à la chair nacrée comme une conque, se baignant dans une mer d'agate. Courbet a tout simplement peint une vague, une vraie vague déferlant sans se laisser décourager, sans se soucier des rires qui accueillaient ses toiles, du dédain ironique des amateurs. On le raillait, on l'appelait le peintre nébuleux, on feignait de ne pas comprendre dans quel sens il fallait prendre ses tableaux. Puis un beau jour on s'avisa que ces prétendues esquisses se distinguaient par un métier des plus délicats, qu'il y avait beaucoup d'air dans ses tableaux ; qu'ils rendaient la nature dans toute sa vérité. Et les clients affluèrent dans l'atelier de l'artiste ; ils l'ont tellement surchargé de travail vers la fin qu'il lui a fallu en partie donner de l'ouvrage bâclé. Je ne connais pas d'exemple plus frappant de la peur que ressent le public devant tout talent neuf et original, et du triomphe inévitable de ce talent original pour peu qu'il poursuive obstinément ses buts".
L'origine du monde
Je ne voulais pas mettre, volontairement ce tableau, parce qu’il a fait parler beaucoup de lui, d’une manière beaucoup plus révélatrice de l’incapacité de notre société à avoir une relation saine au corps, à la nudité et la sexualité, oscillant entre puritanisme et pornographie, que de l’œuvre de Courbet, et du sujet de ce tableau en soi, de surcroît si on le replace dans le contexte de son époque.
Ce tableau est le résultat d’une commande d’un diplomate turc qui avait pour sujet l’origine du monde.
Si j'ai décidé de le mettre à la fin, après avoir mis d'autres oeuvres de Courbet, c’est parce que j’ai appris que son dernier propriétaire, avant que le Musée d’Orsay n’en hérite en 1995, le psychanalyste Jacques Lacan l'avait fait recouvrir d'un cache pour le dissimuler aux regards ! Là j’étais morte de rire … une vraie caricature du psy plus atteint que ceux qu’il prétend soigner !
Alors j'ai craqué, et tant pis si on pense que c'est de la provoc ou du voyeurisme.
Mais associer l'origine du monde au ventre de la femme qui abrite la gestation de la vie en devenir et son sexe par lequel cette vie vient au monde ... bien loin des images pornographiques réductrices et avilissantes, c'est une reconnaissance et un hommage à la puissance créatrice incarnée par le féminin, dépassant les fantasmes de pouvoir destructeur associé au masculin ... à mettre en parallèle avec le désir de déplacer la Colonne Vendôme symbole des guerres napoléonniennes.
Alors merci Mr Courbet. Et bien qu'il soit propagé de vous l'image d'une personnee narcissique, égocentrique, orgueilleuse et paillarde, je me rangerais du côté de ceux qui disent que loin de cet image vous étiez un être humain d'une grande sensibilité. Votre refus de la légion d'honneur, votre engagement lors de la Commune, votre refus de rentrer en France en l'absence d'amnistie générale des communards, votre affection pour vos proches et votre souci de les rassurer même quand vous étiez au plus mal, votre amitié avec Proudhon, les témoignages de Vallès et Zola ... et surtout vos tableaux que j'ai découvert en faisant les recherches pour cet article, plaident tous pour vous en ce sens.