Salariés, retraités, chômeurs, handicapés : solidarité pas de charité
Salariés, retraités, chômeurs, handicapés : solidarité pas de charité !
Cet article est relatif à celui ci-dessous paru dans Montpellier Plus et mis en attente depuis 1 mois, parce que je n'arrivais pas à trier tout ce qui m'est passé à l'esprit en le lisant. J'y ai rajouté plus bas, 4 articles parus dans le Midi-Libre le 21 mai, témoignages des difficultés de survie au quotidien qui affectent une partie croissante de la population.
Réflexions en vrac comme d'habitude, mais je suis de plus en plus inquiète de voir que nous ne sommes pas capables de comprendre que nous sommes tous (ou presque) dans le même bateau, la même galère, de voir qu'au lieu de nous rapprocher les uns des autres pour oeuvrer ensemble, la division est la règle ... nous en sortirons ensemble ou nous coulerons tous !
17 avril 2008
Le premier article (ci-contre) parle de l'ouverture d'une nouvelle épicerie solidaire par l'association Saint-Vincent de Paul.
J'ai surligné en jaune les propos qui m'ont braqué, et j'aurais du souligner le titre en premier !
Pourquoi ? Parce que nous sommes dans une société dont le fonctionnement génére une pauvreté et même une misère, croissantes, touchant de plus en plus de familles. Or ces personnes sont traitées comme si elles étaient dans une mauvaise passe provisoire et/ou responsable de leur situation. On les met dans une position de mendicité, d'infériorité, on se permet de les "trier" en bon et mauvais pauvres, de leur faire la morale et prétendre les "responsabiliser" leur donnant un timing pour résoudre leurs difficultés !
Il y a beaucoup à dire sur le business du caritatif et l'état d'esprit qui y règne. Il y en a des pères et mères la vertu qui sévissent dans ce secteur, comme dans tous les domaines où l'on peut détenir de par sa position un pouvoir sur les autres ! Ne croyez pas que les personnes qui s'adressent à ces organismes de charité, dans leur grande majorité accepteraient de se rabaisser à le faire, si elles avaient les moyens de faire autrement que de venir mendier cette aumône attribuée sous contrôle avec parcimonie. Il y a moins de profiteurs du système, que de personnes préférant ne pas subir cette humiliation supplémentaire tentant de survivre par leurs propres moyens.
Sont surlignés en rose les propos de l'un des bénéficiaires. Honnêtement, vous pensez vraiment que la situation de ce couple va s'améliorer, que d'ici 12 à 18 mois ils auront des revenus autres que ceux qu'ils ont actuellement, leur permettant de vivre décemment ?
Le secteur caritatif s'alarme d'une baisse des dons, alors que la misère augmente. Mais c'est dans l'ordre des choses, car ce ne sont pas les riches qui donnent, ce sont les classes moyennes et populaires, et leurs revenus diminuant par rapport au coût de la vie, elles ne peuvent plus donner autant qu'avant.
Nous sommes dans un système où la logique de fonctionnement est de laisser une minorité vampiriser les ressources appartenant à tous, alors qu'ils n'en ont pas l'utilité, privant les autres de leurs droits à l'existence !
Ces individus ne créent pas de richesse, ils détruisent le bien commun en spoliant la majorité de la population de l'accès à ce qui lui appartient. Cette logique de vampirisation, d'accumulation est dans la nature même du sytème, de même que son évolution vers la concentration de cette accumulation entre les mains d'une fraction de plus en plus restreinte de la population. Prétendre lutter contre cette concentration sans remettre en cause les fondements du système qui l'engendre ... est voué à l'échec. Prétendre qu'aucun autre système de fonctionnement ne peut être envisagé, est mensonger, et rien de pire ne peut arriver que de le croire et de continuer dans cette voie, en laissant la situation s'aggraver.
Le développement du business du caritatif (car cette augmentation de la misère a engendré un business profitable à certains dans divers domaines), est lié à une volonté d'éradiquer toute forme de solidarité individuelle au sein de la société, mais également collective par le démantélement, non d'un Etat providence qui n'a jamais existé, mais d'un Etat garant de la solidarité et cohésion du corps social en veillant au respect des droits de tout un chacun, et donc des droits de tous. Il ne l'était que de manière des plus imparfaites, mais actuellement c'est l'idée même qu'il doive avoir ce rôle qui tente d'être détruite (voire ridiculisée ?).
Conséquence, nous vivons d'ores et déjà dans une société où une partie croissante de la population est privée de ses droits et contrainte à la mendicité pour survivre, "clientèle" des officines de charité distribuant l'aumône aux pauvres, considérée comme une masse d'indigents et de parasites ... une société où les droits de l'homme ont cessé d'exister, parce que presque plus personne ne semble se rappeller ce qu'ils sont et pourquoi en 1789 cette charte avait été écrite ... et pourquoi il avait paru si important à nos aïeux de faire graver dans la pierre des édifices publics les mots "Liberté - Egalité - Fraternité" !
Nous devons arrêter de nous laisser spolier de nos droits sans bouger et reprendre ceux qui nous ont été volés. Ils ne nous serons rendus sans que nous luttions pour les reprendre, comme ont lutté nos aïeux pour les obtenir. Nous devons nous réapproprier les idéaux dont ils sont issus, pour comprendre "pour quoi" et pourquoi nous luttons. Ils sont les piliers, les fondements pour bâtir une autre société. Nous devons comprendre "contre quoi" et "contre qui" nous avons à nous battre, pour cesser de nous déchirer entre nous et comprendre que nous devons agir collectivement ! (oui je sais ... ça fait beaucoup et ce n'est pas dans cette direction que nous allons ... ce qui ne change rien au fait que c'est la seule option viable ! )
Il faut arrêter d'avoir cette stratégie individualiste de défendre son seul bout de gras, persuadé que notre voisin est mieux loti ou cherche à nous le prendre ... c'est nous tromper d'ennemi et être sûr de perdre le peu qui nous reste. Ce sont ceux qui nous manipulent contre le voisin, qui nous le montrent du doigt et l'accusent, qui sont en train de nous affamer et de violer nos droits ... et cherchent de plus, à nous rendre aussi criminels et infâmes qu'eux en nous amenant à faire payer leurs crimes à ceux qui en sont les premières victimes !
Alors ne nous trompons pas de coupables ! Réapprenons ce que signifie "être solidaires". Contre le nombre ils ne pourraient rien ... et ils le savent ! C'est la raison pour laquelle, leur seule action réelle, en-dehors de leur activité de prédation, est de semer la division au sein des populations et entre les peuples !
Illustration ci-dessous de cette fosse à pauvreté dans laquelle la caste dirigeante, avec ses valets et sbires, envoie une partie de plus en plus importante de la population, avec 4 articles du Midi-Libre où témoignent : une femme qui ne trouve que des petits boulots à temps partiel, une retraitée, une rmiste et une salariée, pas smicarde mais presque, de la poste.
édition du 22 mai 2008
700 € par mois, c'est le revenu de Nicole (1). 35 ans, montpelliéraine, elle élève seule ses filles de 7 et 10 ans et gagne sa vie en faisant des ménages, dix-huit heures par semaine, à 10 € de l'heure. L'ANPE ne lui a « jamais fait d'offre », peut-être parce que sa formation initiale est laborantine photo, « une branche morte avec le numérique ». Et le père de ses filles, qui devrait verser 220 € de pension, a disparu depuis 2005.
Côté aides, la Caf accorde 75 € à Nicole pour soutien de famille... en plus de l'allocation logement : « Sur 668 € de loyer, je sors 390 € de ma poche » pour un appartement plutôt vétuste mais qui a l'avantage d'être près du centre, où la dame effectue la majorité de ses ménages et où ses filles sont scolarisées.
La nourriture est le second poste de dépense, avec « deux fois 75 € par mois pour la cantine. Là, elles mangent équilibré... A la maison, c'est pâtes ou lentilles, avec un filet d'huile d'olive . » Pour les « courses de base » , cette maman a adopté le discount. Du pain, elle en prend « parfois dans une boulangerie pas chère » . Pour les fruits et légumes, elle « fait la fin du marché » . Son atout : « Avoir appris à cuisiner. » Question fringues, Nicole a « le réseau famille et amies qui fait tourner les vêtements d'enfants. » Quant à sa propre garde-robe, elle la compose en « achetant aux puces, en raccommodant ». Puis elle confie « trouver quelques trucs dans les poubelles », comme cette table basse, l'abat-jour et une poêle... Sinon, Nicole a rendu son téléphone portable et pris le fixe, « plus rentable ». La prochaine économie sera sur la voiture, gardée « pour aller chez deux de mes patrons, aux portes de Montpellier, et faire les vendanges. Ça coûte trop en entretien et assurance. » Elle prévoit donc de « s'en débarrasser pour sous- louer le parking » et systématiser « le co-voiturage ».
« A force de tirer de tous côtés, on arrive à vivre. » Voix douce, un peu triste, Nicole sourit, « remercie d'avoir, comme (ses) filles, la santé et des dents saines ». Le regard redevenu clair, elle lance « pouvoir même faire des folies ! » Comme « offrir à l'aînée de réaliser son rêve : jouer au basket » . La seconde, qui veut danser, « s'entraîne pour l'instant avec moi ». Elle évite les sorties payantes pour « profiter du pays en allant en bus à la plage, ou pique-niquer au zoo, dessiner au Jardin des plantes. »
(1) Prénom d'emprunt.
Claire « C'est pas une vie, c'est honteux »
Claire Casanova ne sera pas dans la rue pour réclamer une hausse des retraites. Âgée de 73 ans, elle a des problèmes de dos mais elle soutiendra de tout coeur les retraités qui manifesteront. Un soutien facile à comprendre. Claire Casanova perçoit en effet 585 € mensuels de retraite, auxquels s'ajoutent 126 € d'APL (Aide personnalisé au logement). Plus un complément de 100 € par... trimestre, alors qu'elle acquitte chaque mois un loyer de 485 €.
« Ce n'est pas normal de toucher si peu après avoir travaillé toute une vie. J'ai commencé à l'âge de 14 ans. J'ai enchaîné dans des entreprises qui ont disparu. Alors, à la caisse de retraite, ils m'ont expliqué que c'était difficile de retrouver mes cotisations », confie, fataliste, la septuagénaire habitant Sussargues.
Pour l'ancienne comptable qui a conservé la mémoire des chiffres, « la première chose que je paie, c'est mon loyer ». Ensuite, elle doit se contenter de peu et se débrouille : « Mes voisins m'aident en me donnant des légumes. Je ne fais pas de frais. Avec l'âge, on mange moins. Un sac de pommes de terre me fait un mois. Un paquet de riz me dure aussi pas mal. » Sans élever la voix, Claire laisse tout de même éclater sa colère : « C'est pas une vie, c'est honteux ! » Avant d'enchaîner : « J'ai ma fierté, je ne pleure pas misère. Ma soeur, qui vit à Paris, est un peu plus à l'aise que moi. Elle m'aide de temps à autre. » Pour autant, ce n'est pas synonyme d'excès. Ainsi, en matière d'habillement, Claire est loin de faire des folies. « A mon âge, on prend soin de ses affaires. Je profite de la kermesse Loisirs pour un enfant où je peux acheter des vêtements à 1 €. » En raison de son mal au dos, le seul luxe de la retraitée sussargoise, avec l'aide de l'ADMR, est une femme de ménage deux heures par semaine. Qui lui coûte 1,76 € de l'heure.
Retraitée depuis l'âge de 65 ans, Claire Casanova imaginait vivre après sa vie active de manière plus aisée. Parfois, elle s'inquiète : « Si le gouvernement ne fait pas un effort, un jour, je finirai dans la rue. »
ENTRETIEN
A 24 ans, Julie vit seule a vec sa fille. Elle touche le RMI. Ponctuellement, en cas de grandes difficultés, ses parents l'aident. La vie de Julie est rythmée par le calcul et la chasse à la bonne affaire. Elle sourit en se reconnaissant dans la phrase de Coluche : « Chez nous, les fins de mois sont difficiles, surtout les trente derniers jours. »Quelle est votre situation ?
Je cherche un emploi. J'ai une fille de 5 ans scolarisée. Grâce à un héritage, je suis propriétaire d'un petit appartement à Montpellier.
Quel est votre budget ? Je dispose de 563,50 € par mois. Cela correspond à 479,35 € de RMI plus les 84,60 € d'allocation de soutien familial.
Comment se répartissent vos dépenses ?
Mon budget part presque entièrement dans les charges. Je paie chaque mois 25 € d'électricité, 25 € de gaz et 25 € d'eau. A cela, il faut rajouter internet et le téléphone fixe 30 € et l'abonnement pour le téléphone portable 40 €. Je veille à ne jamais le dépasser. Ensuite, il y a les courses qui coûtent un peu plus de 200 €. Les cigarettes représentent 150 € par mois, que j'essaie de diminuer. Il est difficile d'arrêter un budget définitif. Trop d'éléments peuvent venir perturber : un hiver plus rude, ma fille qui déchire ses chaussures, l'augmentation des prix...
Quelles sont les dépenses les plus difficiles à restreindre ? Les produits alimentaires. Ce qui me pose le plus de problèmes, ce sont les vêtements de ma fille. A son âge, il faut les renouveler tous les six mois et les prix sont quasiment les mêmes que pour les adultes.
Comment contournez-vous ces difficultés ?
Je me débrouille. Je me fais envoyer des vêtements par la fille d'une amie de ma mère et j'en échange d'autres. Pour la nourriture, j'ai pris la carte fidélité d'un grand magasin qui me permet d'avoir des bons d'achat. Je n'achète jamais de plats préparés beaucoup trop chers. Je cuisine tout moi-même.
Brigitte « Je travaille, et malgré tout... »
Quand vous lui demandez si elle préfère se faire appeler « facteur » ou « factrice », Brigitte Dubois répond avec le sourire : « Factrice, c'est mieux. » Pourtant, à près de 45 ans, cette mère de deux garçons de 13 et 17 ans a été contractuelle à La Poste, avant d'obtenir un CDI (contrat à durée déterminée).
Une factrice qui, aujourd'hui, sera dans la rue pour demander « une revalorisation des salaires ». Dont le sien, qu'elle ne cache pas. « Je perçois 1 150 € net, pas moins. Avec le complément Poste, sinon mon salaire serait égal au montant du Smic », précise la préposée qui, après le service, est encore vêtue aux couleurs de la maison : bleu marine et liseré jaune.
Brigitte détaille son budget avec pudeur. « Quand je touche mon salaire, je règle tout ce qui est à payer. D'abord le loyer : 750 €. Je prévois aussi un petit budget pour l'essence. Ensuite, il y a l'électricité, les mutuelles, les assurances. Le reste permet de survivre », énumère la factrice dont la tournée est synonyme de 800 boîtes et 40 recommandés quotidiens dans le quartier de Malbosc. A ces dépenses se cumulent 250 € annuels d'impôts sur les revenus et 708 € de taxe d'habitation.
Originaire d'une famille de douze enfants, aujourd'hui divorcée, Brigtte Dubois est loin de vivre dans l'opulence. Même avec la pension alimentaire que lui verse son ex-mari, les écarts de budget sont exclus de son quotidien. Ainsi, en matière d'alimentation, elle fait les courses une fois par semaine : « Cela évite de gaspiller. » Pour le reste, « on jongle aussi avec le découvert bancaire... », explique celle dont les journées, six jours sur sept, débutent à 6 h et s'achèvent à 13 h 10. Avec, toutes les neuf semaines, une semaine de RTT. Un métier qu'elle apprécie pour le contact et le relationnel qu'elle entretient avec les usagers. Alors qu'elle craint de devenir un simple « distributeur de courrier... » Loisirs et sorties appartiennent au domaine de l'utopie. « Je n'ai pas de budget vacances. Je pars dans la famille ou chez des amis », explique Brigitte. Avant de conclure : « Ce qui m'agace le plus est d'avoir la chance de travailler et, malgré tout, peiner pour m'en sortir. »